Un patient peut-il attendre ?

Roxane Osouf-Baude | Pandémie du Covid-19, tension hospitalière, fermeture de lits, réforme de la quatrième année de médecine générale … Ces dernières années, le paysage de la santé en France est marqué par d’importants bouleversements. Ces vicissitudes ont mis à l’épreuve la résilience et l’adaptabilité des professionnels de santé, ce qui engendre inévitablement, des répercussions significatives sur la prise en charge des patients et l’évolution des besoins en santé. Alors que les cabines de téléconsultations émergent, nichées entre le rayon fromage et les appareils électroménagers du Monoprix, il est urgent d’engager une réflexion bruyante sur l’avenir du système de santé, en considérant les conditions et l’accès aux soins des Français. Dans ce contexte, il convient de se pencher sur les conditions de travail et d’étude des soignants garants de la qualité de la prise en soin, qui demeure au cœur des préoccupations.

Un système de santé exsangue

Le système de santé français, autrefois acclamé pour sa capacité à répondre aux besoins de santé des patients, paraît aujourd’hui mis à mal. Aggravée par la crise sanitaire, la tension hospitalière ne s’apaise pas. Désert médical, soutien financier peu satisfaisant, les professionnels de santé tentent de maintenir le cadre hospitalier souvent malmené par les gouvernements successifs qui mènent une politique à court-termiste. 

Les applaudissements nourris en hommages aux soignants lors de la crise Covid-19 ne résonnent plus que comme un lointain souvenir. À présent, ce sont les hauts parleurs des internes en grève qui résonnent dans les rues aux quatre coins de la France dans l’espoir de réveiller un gouvernement somnolent. L’épuisement physique et psychique de certains soignants face aux mesures prises par un gouvernement qui fait la sourde oreille face aux appels en détresse des professionnels de santé ayant de plus en plus de mal à exercer leur métier dans des conditions viables et sans maltraitance. Au-delà d’un simple cri d’alarme, ces revendications doivent impérativement trouver un interlocuteur attentif . Et si les mots paraissent faibles face à l’inertie politique, les chiffres, eux, parlent sans équivoque :

– 30%, c’est le taux d’abandon d’un étudiant infirmier pendant ses études

– 67%, c’est le nombre d’internes en burn out (chiffres de l’InterSyndicale Nationale des Internes)

– 4 étudiants sur 5 se sentent anxieux face aux nouvelles réformes de médecine générale, et 54% des étudiants souhaitant devenir médecin généraliste réfléchissent de plus en plus à exercer en dehors de la France

– 20%, c’est le pourcentage de lits fermés à cause du manque de personnel 

Ces statistiques pour le moins éloquentes mettent en lumière les conditions précaires des métiers du soin ; elles viennent objectiver leurs maux en rendant compte du chemin qu’il reste à parcourir.

Les métiers du soin, à quel prix ? 

Les sirènes du privé attirent de plus en plus de professionnels de santé qui ne se retrouvent plus dans les directives d’un système hospitalier public en souffrance. Faire plus avec moins de moyens humains et matériels se traduit invariablement par une diminution drastique du bien-être au travail. Pour pallier ces insuffisances, il devient impératif d’accroître les ressources financières, matérielles, humaines tout en prenant en  considération les professionnels du care

« Prendre soin des soignants est un facteur de santé publique à ne pas négliger. Pour comprendre les difficultés actuelles du système de santé, en particulier le manque de soignants, l’état de santé de ceux qui sont en première ligne, leur bien-être au travail doit intéresser les décideurs mais aussi la population qui bénéficie de leurs soins. »

La réforme R2C

Les ECOS sont une des dispositions de la réforme du 2ème cycle. En tant qu’examen classant, il permet d’évaluer de manière standardisée le comportement, le savoir-être et le savoir-faire des futurs médecins. Les compétences à évaluer sont diverses : l’entretien clinique, les gestes techniques, la relation médecin-patient, la prise en charge thérapeutique, l’examen physique, la démarche de diagnostic, etc.

“Les ECOS ce sont les examens cliniques objectifs et structurés, une étape majeure du changement à venir des études médicales suite à la loi OTTS (Organisation et Transformation du Système de Santé), 2019. En plus des traditionnels tests de connaissances seront organisés des tests de compétences. Plus précisément les ECOS sont un nouvel outil d’évaluation des étudiants en santé.”

Pour autant, bien qu’il puisse être conçu pour évaluer les compétences des étudiants, il comporte tout de même certains aspects qui posent question : des biais, la subjectivité de notation, l’évaluation arbitraire en fonction des jurys, ou encore un stress accru pour les étudiants, entre autres. Les débats sont ouverts.

Pour conclure, l’un des objectifs de cette année 2024 serait de tendre, grâce à un effort collectif, à la co-construction d’un système de santé fonctionnel et durable. Une réflexion collective s’avère indispensable à propos des conditions d’accès aux soins, les situations d’arrêt de soins thérapeutiques, le cadre de travail des professionnels de santé. Elle devrait permettre de rassembler des forces communes en vue d’améliorer à la fois les conditions de travail des professionnels de santé tout en assurant la pérennité dans la qualité des prises en charge des patients. Pour répondre efficacement aux besoins des patients tels qu’un accompagnement, une écoute et une expertise de qualité, il convient de veiller au bien-être des professionnels de santé, afin qu’ils puissent exercer leur métier dans des conditions optimales. Prendre soin des soignants pour qu’ils puissent à leur tour prodiguer des soins de qualité.

Bibliographie 

VRAI OU FAKE. Crise de l’hôpital : ferme-t-on des lits à cause du manque de personnel, comme l’affirme le ministre de la Santé ? (francetvinfo.fr)

Médecine Générale – ISNI 

Réforme du 2e cycle des études médicales : les ECOS sont prêts ! | Factuel | le site d’actu de l’Université de Lorraine (univ-lorraine.fr)

Hibon, B. (2019). Soigner les soignants: À propos des professionnels du « social » et du « médicosocial » et du flot de ce qui les emporte dans leurs pratiques professionnelles. VST – Vie sociale et traitements, 142, 54-60. https://doi-org.ezproxy.univ-paris3.fr/10.3917/vst.142.0054

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