Les bibliothèques oubliées : la bibliothèque d’Assurbanipal

Version française

Elisa GUIDARELLI | Ninive, actuelle Mossoul en Irak, est une ville prestigieuse dans la Mésopotamie antique. Il s’agit d’un centre de commerce richissime, un lieu hautement considéré par les intellectuels mais également d’un centre religieux dédié à la déesse Ishtar (amour et guerre). L’empire néo-assyrien connait son apogée au VIIème siècle avant notre ère en devenant une véritable puissance dominante dans le Moyen Orient.

Assurbanipal (668-627 av. J.-C.), souverain populaire, est un des derniers grands rois d’Assyrie. Il est notamment connu pour ses nombreuses conquêtes territoriales et la bibliothèque qui porte son nom au sein de son palais, dans la capitale Ninive, qu’il revendique avec fierté. 

Contrairement aux dires, cette bibliothèque n’est pas la première bibliothèque du monde : les prédécesseurs royaux ou les dynasties rivales en possédaient déjà. Mais la bibliothèque d’Assurbanipal est exceptionnelle du fait de son organisation systématique pour conserver au mieux les documents. La préservation des archives s’effectue sous forme de tablettes écrites en cunéiforme[1] pour transmettre le passé à des générations lointaines.

Les sources sont peu nombreuses et ne permettent pas d’affirmer avec précision la date de création de la bibliothèque. Certains chercheurs la situent vers 647 av. J.-C., d’autres plus tôt dans l’histoire. Cependant, un évènement fait consensus : le sac de Ninive par des Babyloniens en 612 av. J.-C.. La bibliothèque brûle, les ennemis cherchent à effacer le passé assyrien glorieux et leur existence sur cette terre.

La bibliothèque contient les manuscrits préservés par le père d’Assurbanipal, rassemblant les savoirs et près de 2000 ans d’histoire. Parmi les documents conservés, on retrouve des textes administratifs et divinatoires, des copies de décrets royaux, des registres fiscaux, des accords commerciaux etc… La divination a une place toute particulière dans la collection. La préoccupation du roi pour son avenir se traduit par de nombreux échanges avec des voyants et scribes et les lettres sont copiées pour être conservées.

On retrouve également des grands récits comme l’épopée de Gilgamesh, la correspondance personnelle de la famille royale, des textes de sciences (astrologie, botanique, astronomie) ou bien des textes religieux. La bibliothèque se dote aussi d’un personnel spécialisé comme le chef conservateur qui s’occupe de l’état des copies et de l’entretien des collections. Elle est organisée, les documents sont classés avec précision : il ne s’agit plus de simples archives mais d’ un lieu de connaissance et d’histoire.

Bibliothèque d’Assurbanipal ©Gary Todd (public domain)

En 1853, deux archéologues pionniers, Sir Austen Henry Layard et Hormuzd Rassam publient leur ouvrage de fin de fouilles et le monde découvre l’héritage d’Assurbanipal. Ironiquement, lors de l’incendie de la bibliothèque, des milliers de tablettes en argile qui constituaient les livres ont été enfouies sous les cendres, cuites et donc préservées[2]. Il s’agit d’une des plus grandes découvertes archéologiques du monde moderne : elles nous apportent de larges et précieuses connaissances sur la vie au Ier millénaire avant notre ère. Cependant, ces textes sont incomplets, fragmentaires et limitent la reconstruction totale de la collection antique.

Source : Bibliothèque d’Assurbanipal – Encyclopédie de l’Histoire du Monde

[1] Système d’écriture développé vers 3200 av. J.-C. par les Sumériens, peuple mésopotamien

[2] Aujourd’hui conservées en partie au British Museum

English version

The Forgotten Libraries: The Library of Ashurbanipal

Nineveh, today’s Mosul in Iraq, is a prestigious city in ancient Mesopotamia. It was at the same time a wealthy commercial center, a place highly valued by intellectuals, and a religious site dedicated to the goddess Ishtar (love and war). The Neo-Assyrian Empire reached its peak in the 7th century BC, becoming a major power in the Middle East.

Ashurbanipal (668–627 BC), a king admired by his people, was one of the last great kings of Assyria. He is especially known for his military conquests and for the library that bears his name, located in his palace in the capital, Nineveh, a source of great pride for him.

Contrary to popular belief, this was not the first library in the world: earlier kings and rival dynasties already had collections. However, Ashurbanipal’s library was exceptional because it was systematically organized to preserve documents in the best possible way. Archives were kept on clay tablets, written in cuneiform and designed to transfer the past to future generations.

There are few sources, so the exact date of the library’s creation is uncertain. Some researchers date it to around 647 BC, while others suggest an earlier period. One event, however, is certain: the sack of Nineveh by the Babylonians in 612 BC. The library was burned, as the conquerors wanted to erase the glorious Assyrian past and its legacy.

The library contained manuscripts preserved by Ashurbanipal’s father, gathering knowledge from almost 2,000 years of history. Among the texts we found administrative and divinatory writings, copies of royal decrees, finances papers, commercial agreements, and more. Divination had a special place in the collection: the king’s concern for his future is reflected in his exchanges with seers and scribes; these letters were copied and preserved.

The library also kept literature such as The Epic of Gilgamesh, personal correspondence from the royal family, scientific texts about astrology, botany, and astronomy, as well as religious writings. It had a specialized staff, like a chief curator responsible for checking copies and maintaining the collections. The documents were carefully organized, it was no longer a simple archive but a true center of knowledge and history.

Bibliothèque d’Assurbanipal ©Gary Todd (public domain)

In 1853, two archaeologists, Sir Austen Henry Layard and Hormuzd Rassam, published the results of their excavations, revealing Ashurbanipal’s legacy to the world. Ironically, when the library burned, thousands of clay tablets were buried under the ashes, baked by the fire, and preserved. It remains one of the greatest archaeological discoveries of the modern era, providing invaluable insights into life in the first millennium BC. However, many texts are incomplete or fragmented, limiting the full reconstruction of this ancient collection.

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