P.G.M, le 02/03/12
Un vélo pour les femmes saoudiennes
Wadjda est film modeste et brillant qui propulse la toute première femme réalisatrice d’Arabie Saoudite sur la scène internationale.
Haifaa Al Mansour est devenue cinéaste par hasard. Un jour elle se retrouve employée par la section média de l’industrie pétrolière dans laquelle elle travaille. Elle touche à la caméra, elle apprend vite et tourne un court métrage sélectionnée par le festival d’Abou Dabi. Elle est officiellement reconnue par les émirats comme une femme cinéaste et obtient le feu vert pour tourner Wajda, son premier long-métrage.
Wajda c’est le nom d’une jeune saoudienne, interprétée par la pépite Waad Mohammed, qui rêve d’avoir un vélo. Pourtant en Arabie Saoudite aucune fille ne fait du vélo. La gamine têtue et débrouillarde décide de tout faire pour pallier l’interdiction.
Intelligemment Haifaa Al Mansour nous donne à réfléchir non pas sur l’intégrisme musulman mais sur la schizophrénie qui opère au sein de chaque foyer. A l’extérieur le voile intégral, à l’intérieur le maquillage et les robes avantageuses. Les femmes sont face à un complexe qui paraît de plus en plus absurde. L’enfant face à ce paradoxe essaie de créer une troisième voie. Wadjda est l’héroïne du sexe faible, celle qui impose son droit d’exister en affichant son nom sur l’arbre généalogique du père. Elle est prête à se lancer dans la course contre son petit voisin mais aussi contre le machisme. Wadjda est encore faible, elle fait des erreurs, mais soutenue elle peut réussir. Sa mère, personnage multiple, incarne avec saisissement un femme qui finit par comprendre que ce qu’on lui a appris être un rêve n’est qu’un cauchemar . Les trois meilleures scènes du film sont indéniablement celles sur le toit de leur maison. La mère et la fille sont à l’extérieur et à l’intérieur en même temps. Le paysage aride est confronté à leurs chevelures arabes. Le film rend leur beauté à toutes ces femmes cachées.
Pour Wadjda, pour Haifaa Al Mansour et surtout pour toutes les filles du même âge de Waad Mohammed, nous espérons que ce film trouvera un échos dans son pays et qu’il résonnera comme un pistolet de départ pour toutes les femmes prêtes à défendre leurs droits.