Suzanne, de Katell Quillevéré, avec Sara Forestier, François Damiens, Adèle Haenel. Sortie le 18 décembre 2013.
Par Lina Jeannin
Suzanne, dernier film de Katell Quillevéré, est une véritable épopée romanesque. Nous suivons le personnage de Suzanne, interprété par Sara Forestier, durant les vingt-cinq premières années de sa vie, depuis son enfance marquée par la perte de sa mère. Lors de son adolescence, elle tombe enceinte et décide, « parce que j’en avais envie » dit-elle, de garder le bébé. C’est d’ailleurs cette phrase qui va alors régner en maîtresse sur la vie de la jeune femme : elle rencontre Julien, un malfrat dont elle tombe éperdument amoureuse, et abandonne son enfant pour s’enfuir avec lui.
Dans ce film, le premier rôle auquel nous peinons à nous attacher tant son amour lui fait commettre des actes d’un égoïsme saisissant, met en avant les seconds rôles, ceux de son père Nikolaï, interprété par François Damiens, et de sa sœur Maria, magnifiquement jouée par Adèle Haenel. En réalité, ce sont eux qui nous touchent le plus, présents pour Suzanne jusqu’au bout, alors qu’elle les avait délaissé si facilement.
Le naturalisme dont ce long-métrage fait preuve ne cesse de nous rappeler le déterminisme social qui pèse lourdement sur les personnages. Les ellipses, très présentes et quelque peu gênantes au début, mettent toutefois bien en lumière tous les bouleversements auxquels les personnages ne cessent de faire face.
La réalisatrice aurait pu tomber dans un pathos que la vie tragique de Suzanne laissait supposer, et pourtant la justesse des acteurs l’en empêche, laissant place à un imaginaire du hors champ qui donne au spectateur une grande liberté d’interprétation quant au scénario.
Katell Quillevéré nous livre ainsi le portrait brut d’une femme simplement touchée par la folie d’un amour bien plus fort qu’elle.