Hubert Camus, le 02/03/2015
Au début du mois de février a paru le nouvel ouvrage de Yannick Haenel, Je cherche l’Italie (Gallimard, collection L’Infini, 2015, 200 pages). Deux ans après son roman Les Renards pâles (Gallimard, collection L’Infini, 2013, 175 pages), mettant en scène un marginal trouvant une raison de se révolter auprès de la communauté dogon (Mali), l’auteur en revient au genre du récit. Ce n’est en effet pas la première fois qu’il fait ce choix : on se souvient du très beau Sens du calme (Mercure de France, collection Traits et portraits, 2011, 223 pages).
Je cherche l’Italie est le récit de l’expérience de l’auteur de 2011 à 2014 dans l’Italie berlusconienne. C’est avec délectation que l’on retrouvera la finesse de sa plume, impliquée cependant dans les affres de l’actualité. Il est beaucoup question, dans Je cherche l’Italie, de Georges Bataille, de littérature et de la merveille de la culture italienne. Mais il le dit lui-même : « Les charmes de l’Italie m’intéressent, bien sûr, mais j’attends autre chose du récit qui me les confie », page 79. Car la grandeur des témoignages du passé est mise en regard avec la situation actuelle de notre voisin. Comment l’Italie a-t-elle pu en arriver là ?
C’est, en partie, le sens du titre : en Italie il y était, il la connaissait déjà pour avoir été pensionnaire de la Villa Médicis, mais l’Italie est-elle toujours l’Italie ? Le Duomo de Florence, les tombeaux des Médicis sculptés par Michel-Ange et le couvent San Marco sont concurrencés par le sourire mauvais du Bunga-Bunga de Berlusconi. Comment l’Italie, comment la culture ont-elles pu en arriver là ? Peut-on encore trouver l’Italie ou sa grandeur n’est-elle plus qu’un souvenir ?

Yannick Haenel a rédigé Les Renards pâles en Italie : son récit en trace une partie de la genèse. Une fois de plus, les thèmes de la mémoire (qu’elle soit culturelle, comme nous l’avons dit, ou concerne Hiroshima et le nazisme) reviennent régulièrement. Derrière la beauté de ses phrases se trouve toujours une profondeur interrogeant le passé à la lumière du présent. Qu’avons-nous fait, Européens, de nous-mêmes ?
Alors que la sortie de Jan Karski (Gallimard, collection L’Infini, 2009, 187 pages) avait été retentissante et que Les Renards pâles avaient fait couler beaucoup d’encre, la parution de Je cherche l’Italie est étonnamment discrète. Yannick Haenel a été l’invité d’une émission télévisée et sera le 25 février sur France Culture mais aucune critique ne semble se faire l’écho de cet ouvrage qui le mérite pourtant. Les Renards pâles étant devenu disponible en format poche au même moment que la publication de Je cherche l’Italie, Yannick Haenel semble se faire de l’ombre à lui-même…
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