FASTER, PUSSYCAT ! KILL ! KILL !
Russ Meyer
1965
En fixant sur la pellicule les aventures furieusement hallucinées de trois go-go-danseuses au cœur du désert californien, Russ Meyer offrit aux salles obscures le plus grand film de série B de tous les temps. Un navet osé, assumé et oscarisé.
Afin d’attirer les spectateurs au plus sombre de la Grande Dépression, studios et salles de ciné décidèrent de projeter deux films à la suite pour le prix d’un unique billet. C’est le principe du double feature : tout d’abord, un film d’actualité, bande-annonce ou film petit budget (B-movie) et ensuite seulement, le film principal (A-movie). Western, horreur, SF, sexe, détective, gangsters, bolides… le série B devint genre à part entière et gagna avec les années cinquante et soixante ses galons de subculture. Parmi les apôtres de la face B ; Meyer, Corman, Romero, Polanski, Hopper ou Tarantino.
Meyer donne ici un joli coup de pied dans la fourmilière conservatrice qu’est l’Amérique de 1965. Alternant érotisme gentil, action burnée et corps à corps suggestifs, chaque minute redistribue les cartes et chamboule les codes. Ce qui semble débuter comme un film de bagnoles survolté prend soudainement des faux airs de western spaghetti avant de devenir nanar d’horreur ou romance à l’eau de rose frelatée.
Sexy symbiose entre strippeuses de campagne et bikers férus d’ultra-violence, le trio féminin qui tient le haut de l’affiche bouleverse les habitus. Elles sont pin-ups star des années 1960, cousines américaines des déesses pop en robes Courrèges de Carnaby Street, boivent de la Budweiser en canette et allument leur Vogue d’un éclair de Zippo. Un trio de dianes chasseresses, mercenaires de la cause féministe.
Un film tout en paradoxe, réalisé avec $45.000 et des brouettes. L’atmosphère nanar assumée et les ficelles gauches auraient suffit pour condamner la pellicule aux geôles de l’Histoire. C’est néanmoins dans le traitement des sujets abordés que le film se montre résolument novateur : homosexualité et libération sexuelle, représentation et rôle des genres, choc des générations… Cette impudence rebelle et cette liberté de ton ouvrirent la voie à toute une génération de réalisateurs dans leur mission d’incarner à l’écran fureur de vivre et société en révolution.
Sur fond de surf music et de métal hurlant, James Dean en jean moulant et débardeur échancré, Easy Rider en Porsche 356, Boulevard de la Mort en noir et blanc.
Pour aller plus loin dans le B :
Machine-Gun Kelly, Roger Corman, 1958
Motorpsycho, Russ Meyer, 1965
The Wild Angels, Roger Corman, 1966
The Trip, Roger Corman, 1967
La Nuit des morts-vivants, George Romero, 1968
Le Chat à neuf queues, Dario Argento, 1971
Vanishing Point, Richard C. Sarafian, 1971
Shaft, Gordon Parks, 1971
Super Fly, Gordon Parks Jr., 1972
Coffy, la panthère noire de Harlem, Jack Hill, 1973
The Rocky Horror Picture Show, Jim Sharman, 1975
Boulevard de la mort, Quentin Tarantino, 2007
Machete, Robert Rodriguez, 2010
Clément THIERY
+ Planet Terror, de Robert Rodriguez, 2007.
L’Attaque des Tomates Tueuses, de John De Bello, 1978.