Guillaume Collet, le 21/09/2012
Si, avec le lot de bonnes résolutions habituelles des débuts d’année, les récentes promesses gouvernementales ou les désaveux, c’est selon, votre enthousiasme reste intact ; si, comme la bêtise humaine, vôtre optimisme semble inaltérable et vous rend gentil, pire « niais » dans les soirées ; plongez avec la rigueur et le sérieux qu’il convient dans Les lisières d’Olivier Adam.
Une ode au suicide, une déclaration d’amour au néant ? Non, mais un violent rappel de toute la grise tristesse que peut contenir notre quotidien. Tout au long des 500 pages, l’auteur entretient par la répétition un regard désœuvré entre l’apitoiement et la consternation sur le monde qui l’entoure. Des vieux aux jeunes, des prolétaires tendance beauf banlieusards aux riches intellectuels bobo forcément Parisiens ; tout est sujet à la gravité, au constat d’un destin en faillite. Même la télévision et ses belles émissions de télé réalité sont attaquées.
Réactionnaire pamphlétaire ? Non plus, Olivier Adam flirte, frôle, mais au final évite, ce fréquent écueil de la littérature en prise avec le social. Une sincérité revendiquée, soutenue par une prose sans emphase mais aussi une réflexion de fond évite le pur déballage réactionnaire. Car si le sujet principal semble être le rapport de l’individu avec la culture et son formalisme, on peut y voir surtout une mise à l’épreuve d’une certaine littérature.
En effet, ce constat du cloisonnement des classes, subit et entretenu par chacun est dénoncé à travers le parcours de Paul : écrivain scénariste au divorce douloureux. Celui-ci revient voir ses parents dans sa ville natale. Ses angoisses actuelles se confrontent alors avec le souvenir du mal être de sa jeunesse. Pour justifier ou expliquer l’un et l’autre il va faire le procès de la société, mais surtout, constater les paradoxes de sa propre littérature qui, oh! fatalisme de l’autofiction, semble si proche de celle de l’auteur. Cette écriture, qui trouve sa force dans les origines modestes de son auteur, se retrouve en prise avec les personnes qui l’inspirent mais qui ne la lisent pas, pire la dénigrent.
Alors, si vous êtes riches, vivant dans un ghetto de nantis ou qui sait, dans une véritable tour d’ivoire, envoyez une de vos licornes acheter ce roman. Il rassasie ce qu’il faut de notre curiosité malsaine quant au malheur des autres, et complait cet agréable sentiment qui est de savoir qu’il existe des gens plus bêtes et moins chanceux que nous.
Pour ceux qui ont au moins une fois fréquenté un quai de RER et que l’ISF n’inquiète, bref ceux qui savent que le monde est plus rude qu’une publicité, ce récit ne fera que souligner avec défaitisme les problèmes qui nous étreignent chaque jour, ni plus ni moins.