Les Époux
David Lescot.
mise en scène par Anne-Laure Liégois.

Après Macbeth, Anne-Laure Liégeois s’intéresse à l’histoire des Ceauşescu, le couple tyrannique de Roumanie. Dans cette pièce l’intime, lié au politique, la folie, la mégalomanie s’emboîtent et constituent le fond du pouvoir despotique et cauchemardesque des peuples.
Dans une boite blanche, deux narrateurs en costumes traditionnels, avec en arrière-plan une musique folklorique roumaine, nous attendent pour nous livrer l’histoire de ces personnages depuis l’enfance – des individus très «ordinaires» – la vie à la campagne, l’usine, le militantisme communiste, l’ascension politique, les cuillères en or volées, le Palace…
Le spectateur entre dans l’intime mesquinerie du couple et découvre l’atrocité déguisée de leur politique via la projection de vidéos. Les Ceauşescu restent des tyrans jusqu’à la fin : le spectateur re-découvre leur procès sommaire et leur exécution diffusée à la télévision à côté du sapin de Noël 1989.
Anne-Laure Liégeois se souvient de ces images télévisées et fait une commande d’écriture à David Lescot. Celui-ci réinvente cette farce politique pour deux acteurs étonnants, Agnès Pontier et Olivier Dutilloy. On ne peut montrer l’abject qu’en comédie grotesque et drôle.
Comment ne pas en rire et rire jaune, lorsque, par l’ironie de l’histoire, au même moment sur la scène politique, Rome et le Vatican voilent la nudité de leurs statues pour ne pas choquer les despotes religieux d’Iran, et Paris cache ses coupes de vin pour ne pas blesser les croyances de ces derniers. Surtout, flatter les dictateurs ! Comme l’avaient fait en leur temps De Gaulle, Nixon, … avec le couple Ceauşescu ! Autre ironie : les dictateurs de Roumanie ont chuté trois jours après leur dernier voyage dans l’Iran des mollahs, au pays des tyrans religieux. Anne Laure Liégeois en fera-t-elle une autre histoire? Si les mollahs ont « apporté la poisse » comme disaient les iraniens à l’époque aux Ceauşescu, le voyage en Europe pour les tyrans religieux d’Iran ne fera qu’accroître leur hégémonie sur les iraniens.
Par Anna Salimi