Annie Welter | Chaque automne depuis près de 20 ans, la ville de Caen accueille un incontournable festival de musique électronique : le Nördik Impakt. Avec quelques dizaines milliers de festivaliers chaque année, le festival fait raver/rêver toute la région, année après année. Nouvelles Vagues est parti à la découverte de cet événement jouissif et hors normes !
En 1999, l’association Arts Attack! accouche d’un nouveau projet : créer un festival de musiques électroniques contemporaines et susciter le débat autour de nouvelles formes artistiques et musicales. Avec pour ambition de rassembler les générations et les milieux sociaux autour de la musique, le Nördik Impakt regroupe des musiciens et DJ internationaux aux approches musicales innovantes. Résultat : 18 éditions, près de 20 000 festivaliers chaque année, des têtes d’affiches rencontrant des artistes émergents et une popularité toujours croissante.
Un 19e festival qui frappe fort – 20 & 21 octobre 2017
Cette année encore, le Nördik a tenu ses promesses. Les pointures de la techno internationale ont répondu présent : Ann Clue, Pan-Pot et Monika Kruze pour l’Allemagne, Paula Temple pour l’Angleterre, Amelie Lens pour la Belgique, Manu le Malin, DJ AZF et Vitalic pour la France. Les sets s’enchaînent et se complètent : les trois salles du Parc des Expositions vibrent et font vibrer les Caennais. Retour sur deux soirées phénoménales qu’on attendait depuis longtemps.
Jour 1 – encore frais
23h – la file d’attente devant le Parc des Expositions est déjà gigantesque. Cette année, les artistes les plus attendus sont programmés très tôt : de nombreux festivaliers grognent contre l’horaire du set d’Amelie Lens – 21H45, il faut être prêt. Pour notre part, on l’aura ratée…
Minuit – après moult péripéties (contrôle de billets, récupération des bracelets cahshless, palpations réglementaires, achat de la première bière de la soirée ou produits illicites pour certains), nous entrons dans une des deux salles latérales. Le Hall of Death accueille alors Paula Temple, reine de la techno anglaise, sombre mais délicate. On range son manteau, s’attache les cheveux, on bondit dans la foule – let’s rave.
1h45 – Nombreux sont ceux qui attendent la transition entre la belle anglaise et le dinosaure de la techno indus(trielle) française : le grand Manu Le Malin. Les deux DJ prennent un quart d’heure pour mixer ensemble, et c’est un pur bonheur. Puis le papa prend la main : le set commence doucement, presque lentement, et promet d’être inouï. On entend des mécontents qui s’impatientent, et qui n’ont pas compris que cette lenteur était faite pour souffler un coup avant d’attaquer sérieusement. Puis ça commence. Ça cogne, on se laisse porter, on a déjà un peu mal aux pieds mais qu’importe – le son est incroyable, le rythme est parfait, les transitions sont impeccables. On reconnait l’expérience. Les lumières baignent les visages ravis et accompagnent à la perfection les rythmes métalliques. Manu, merci : c’était magique.
2h30 – pause clope, pause bière, on s’assoit, on respire, on retrouve des connaissances. On est en Normandie, « i’r pleut » mais on a l’habitude (et on a pris nos Kway). On cherche nos amis. Aucun réseau sur nos téléphones – trop de monde – mais le fameux « gros-lampadaire-juste-à-côté-des-fontaines-à-eau-oui-voilà-celui-là-aller-à-toute » fera l’affaire. Le poste de secours est bien occupé ; c’est que les malaises, bad trip, comas et autres incidents commencent à s’accumuler. On a vu passer le premier brancard à 23h. On vérifie que tout le monde est là (et en un seul morceau) : on y retourne. DJ AZF prend bientôt le relai – pas le temps de se refroidir. Rendez-vous à 4h au même endroit.
3h00 – Il est l’heure d’explorer. On se sépare en plus petits groupes, on passe dans les autres salles. On retrouve d’autres amis, on tente de parler, mais impossible. Et nos oreilles commencent à siffler – ça n’aide pas. Alors on continue à danser. DJ AZF, en costume traditionnel de teuffeuse, gros pull baskets et queue de cheval, ne nous épargne pas ; on s’avance jusqu’aux barrières devant la scène pour l’observer mixer. Une énergie inépuisable !
5h00 – Fin du set d’AZF. On se dirige vers la sortie pour prendre une navette bondée pour (enfin) rentrer chez soi. On a même des places assises – le luxe. Coucher 7h, et on remet ça demain !
Jour 2 – épuisés mais heureux
14h00 – Le réveil sonne, ça pique un peu. Un café, une douche, une part pizza et c’est reparti. On s’organise de nouveau pour la soirée qui arrive – qui veut voir quel artiste ? Sur quelle scène ? À quelle heure ?
21h00 – Arrivée au parc des expositions. Cette fois, on s’est organisés pour ne pas rater les premiers concerts. La première bière a du mal à descendre, mais une chose après l’autre, la motivation revient. On enlève nos kways et on fonce dans le son. C’est reparti. La bête de scène Lorenzo, caricature du rap français, nous intrigue et on rigole un bon coup. Barnt commence bientôt – les choses sérieuses reprennent.
Minuit – On se regroupe dans le Hall of Fame à côté de la régie lumière (le son est vraiment très fort dans la salle principale – même avec des bouchons d’oreilles…). S’enchaînent Barnt, plus violent que dans ses albums, Monika Kruse, aux sonorités typiquement allemandes, Umek puis Mind Against, aux kick sales mais fort plaisants. On pensait que le samedi serait plus calme, plus expérimental que le vendredi : nous avions tort. « C’est vraiment du bon gros boum, ça décape ! » comme dirait mon voisin pendant Umek, visiblement sous influence mais très jovial.
3h30 – grosse coupure de son devant Mind Against : on quitte le Hall of Fame pour le Wonder Hall, où Ann Clue passe bientôt les platines à Helena Hauf. À peine notre nouveau coin trouvé, elle arrive, et lance ses meilleurs beat – ça punch, ça promet ! Deux heures de mix impeccable, où la finesse et la violence du boum s’équilibrent parfaitement. Tu es un génie, Helena. D’ailleurs, mon mec veut t’épouser… je ne lui en voudrai même pas !
5h00 – Le set de l’allemande se termine, retour au Hall of Fame pour la dernière heure de Tale of Us. Plutôt perplexe sur le papier, notre groupe est immédiatement convaincu une fois arrivé sur scène. Un kick plus lent mais plus profond – parfait pour finir la soirée en beauté.
6h00 – On saute dans la dernière navette, des boums plein la tête et les pieds en feu. C’est fini pour cette année. On passera les six prochains mois à se remémorer ces deux soirées, ces sons, ces rencontres, ces petites galères et ces acouphènes (oups…). Puis on passera six mois à attendre le prochain. Parce que le Nördik, on l’aime d’amour. Et on reviendra tous les ans.