Être caissière en temps de crise sanitaire. Episode 3 : Dans un profond silence tu marcheras.

Sara Machtou | Le silence. C’est dans un certain silence que je me rends au travail maintenant. Les rues sont calmes, pas un chat. Les bus, les cris d’enfants, les gens qui parlent, qui rient et s’énervent, cette cacophonie du centre-ville n’est plus. 

Au cours de ma route je dois traverser de long en large la fameuse « rue de Paris ». Elle est parsemée d’échoppes en tout genre, de coiffeurs afro, de kebab, de téléboutiques, de boulangeries. On y trouve aussi une auto-école, une bibliothèque, un bar, un coin spécifique où se deal des herbes de toutes sortes. Tout au long vous entendez parler tamoul, portugais, turc, roumain. C’est une sonorité de plusieurs langues que vous entendez en plus de pouvoir observer tant de visages d’ailleurs. Il y a du vivant humain partout. 

En fin de rue, il y a une intersection. Par la droite vous empruntez la rue où se trouve le conservatoire de la ville. Pianos, guitares, trompettes, harpes, plus aucune musique n’est émise au dehors. Tout est mis en sourdine. A gauche il y a le pont. Je l’emprunte afin de le traverser. En bas sur les berges il y a souvent des pêcheurs qui y sont installés. Maintenant plus personne. Leur faits et gestes ont tout aussi disparus. Mon regard se concentre autre part. De mon poste d’observation, c’est la Seine seule et ses reflets que je contemple alors. Au fil des jours je remarque que l’eau qui descend est plus clair. 

Après le pont vient la nationale. Je dois en longer une petite partie. Les allées et venues des automobilistes se sont drastiquement réduites. Bien que présente, l’odeur du carburant s’est en grande partie estompée. La nature a repris un peu le dessus sur les bruits et senteurs d’un monde moderne. Sur le chemin je vois l’hôpital de la ville placé sur les hauteurs. Dans mon avancement je suis toujours étonnée et admirative des paysages nuageux que je découvre à chaque fois. Dans une belle et profonde solitude, je marche. Tout est paisible. Je suis une promeneuse solitaire qui n’en oublie pas de rêver en chemin. 

La respiration est meilleure, les muscles sont renforcés, l’esprit est plus détendu. Cette route que je prends pour aller au travail permet de forger le corps à l’épreuve. Non loin, l’Aéroport d’Orly a fermé ses portes. Les avions ont laissé plus de place aux oiseaux. 

Mais ces oiseaux à l’horizon ne sont-ils pas plutôt des oiseaux de mauvaise augure ? Que m’arrivera-t-il dans un avenir proche ? Est-ce une promenade sans encombre ou une marche vers un repos éternel ? Ne vaut-il pas mieux faire demi-tour ? Où je m’aventure ainsi ? Y a t-il des choses que j’ai oublié d’envisager ? Que se passera-t-il lorsque j’aurais franchit le seuil de l’hypermarché ? Quel adversaire m’attend une fois rentrée dans l’arène ? Suis-je David dans son combat contre Goliath ? Comment devrais-je mener l’affrontement ? Coûte que coûte, je dois y aller. 

> Episode 2 : Une relation client autre.

> Episode 4 : Home sweet home.

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